La parole agit dans le silence

22 décembre 2024

   Au commencement était le Verbe, la Parole de Dieu. Notre foi de chrétiens et, avant nous, la foi d’Israël c’est qu’au commencement, la Parole de Dieu a créé le monde. Le Verbe a agi en silence préparant pour l’homme un monde où il puisse vivre. Le Verbe engendre la vie et la vie illumine nos routes. La parole ne fait pas de bruit et nous croyons souvent qu’elle n’existe pas parce qu’elle ne fait pas de bruit. Les arbres font-ils du bruit quand ils poussent ? Fait-il du bruit le rejeton qui pousse sur le tronc de Jessé. « Comme la pluie et la neige descendent des cieux et n’y remontent pas sans avoir arrosé la terre, l’avoir fécondée et fait germer, pour qu’elle donne la semence au semeur et le pain comestible, de même la parole qui sort de ma bouche ne me revient pas sans résultat, sans avoir fait ce que je voulais et réussi sa mission  » (Is. 55,10-11). Pendant des siècles, la vie émergeait et elle était signe du Verbe, jusque dans le sein de Marie. Patiente, la parole a agit dans le silence et par la voix des prophètes. Le Verbe que nous fêtons à Noël sortira lui-même du silence après trente ans à Nazareth pour rencontrer l’homme.

   A ceux qui l’ont reçu, accueilli, il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu. Le Verbe est venu à nous pour que nous devenions enfants de Dieu, pour que nous partagions sa condition de fils et sa divinité. Devenir enfant de Dieu est un don. Le Verbe s’est fait chair. Et cela pour nous. Et sur ce mouvement de kénose (appauvrissement) du Fils unique de Dieu, le Père dit une parole : « Tu es mon Fils, aujourd’hui je t’ai engendré » (Ac. 13,33 ; Hé. 5,5). Voilà bien la seule parole qui habite le coeur de Dieu le Père : il aime son Fils et, dans le Fils, il nous voit et il nous aime. « Je serai pour lui un père, il sera pour moi un fils. » Devenir enfant de Dieu est un don mais nul ne peut devenir enfant de Dieu s’il n’accueille ce don. C’est ce qui est arrivé avec Marie, elle qui a dit : Qu’il me soit fait selon ta parole. Recevoir le don de Dieu, accueillir la paternité d’un autre c’est consentir à entrer dans une confiance filiale et dans l’humilité. Cet acte de recevoir d’un autre le don d’être fils conduit l’homme debout, indépendant, autonome et fier à renoncer à ce qui est de l’ordre de l’orgueil. C’est un combat. Ce combat se passe au coeur de l’homme. Dans ce lieu intime et caché qui reçoit la Visite de la Parole, qui s’ouvre ou se ferme à cette visite. Lieu de la conversion et de la naissance de l’homme nouveau. La parole accueillie engendre la vie dans la chair de l’humanité. J’en suis témoin, pour moi-même et pour d’autres.

Abbé Frédéric Fermanel