En acceptant que les cendres soient posées sur notre corps, nous
reconnaissons ensemble, comme les gens de Ninive, comme les habitants de
Jérusalem au temps de Joël que nous sommes pécheurs. Le geste que nous
posons anticipe symboliquement la destruction de la ville et de ceux qui
l’habitent. Le geste dit le retournement du coeur qui entend l’appel à la
conversion et reconnaît son péché ou a le désir de le reconnaître. Ce geste des
cendres est une action qui témoigne sur le corps de l’attitude du coeur. Lorsque
l’on est invité à un mariage, on s’habille avec des habits de fête pour s’associer
à la joie ; ici on reçoit les cendres comme un signe qui manifeste la tristesse qui
nous habite face à l’écart entre la parole du Seigneur et la manière de mener
notre vie. Cette tristesse est une grâce ! Elle est le ressort d’un retournement
vers le Seigneur.
Marqués de la cendre sur notre corps nous témoignons ensemble
publiquement de l’œuvre de l’Esprit saint en nous : il purifie nos cœurs comme
l’or est passé au creuset. Nous croyons que les langues de feu manifestées à la
Pentecôte viennent sur nous, font leur travail en brûlant l’ivraie et que l’Esprit
témoigne en nos cœurs que nous sommes appelés à revivre dans le Christ. Cette
anticipation du geste des cendres dit notre foi en la résurrection. Et c’est à ceux
qui croient cela que Jésus s’adresse dans le discours sur la montagne. Lorsque
Jésus dit : « Si vous voulez vivre comme de justes... », il rejoint ce lieu du coeur
de l’homme où l’Esprit saint travaille, ce lieu où la liberté consent à accueillir
l’appel de Dieu à la conversion.
Jésus nous invite à entrer dans la discrétion. Renoncer à la mise en scène...
Et comprendre que faire l’aumône, c’est pour partager gratuitement ce que j’ai
reçu gratuitement avec celui qui n’a pas ; Prier, c’est pour écouter Dieu, sa
Parole et lui parler comme le mouvement le plus profond du coeur ; Jeûner, c’est
poser un acte entre le Seigneur et moi, un acte de mémoire comme la prière, un
acte qui touche le corps et ses pulsions les plus basiques. Jeûner en prenant un
seul repas dans la journée. Jeûner en marchant une demi-heure gratuitement,
sans but sinon à me reconnaître créé au milieu du monde, m’émerveillant pour
le travail de l’homme et pour le travail de Dieu.
« Si vous voulez vivre comme de justes... ». Jésus ne nous force pas. La
Parole du Seigneur frappe à la porte de chacun de nous. A nous de trouver notre
réponse, de la recevoir, de la demander dans la prière au cours de ces 40 jours.
Abbé Frédéric Fermanel