À Cana, ni le maître du repas ni le marié n’ont su d’où venait ce bon vin. Marie, elle le sait. Marie a vu avant les autres que le vin allait manquer. Lorsqu’elle dit « Ils n’ont pas de vin » son attention nous touche ; c’est l’attention d’une maîtresse de maison, d’une mère, d’une bonne amie de la famille.
Jésus, lui, est touché par autre chose : « ils se marient, ils vont au temple et ils ont oublié le Père des cieux, Notre Père ». Pour lui, Jésus, le Peuple ne manque pas d’abord de vin, le Peuple manque de Dieu. Le disciple de Jésus c’est celui qui entre dans cette compassion. Comme Jésus, il espère une réconciliation entre Dieu et l’humanité.
Ce bon vin donné à Cana annonce le vin nouveau du Royaume qui coule et coulera au jour de la réconciliation et du pardon. Lors de la dernière Cène, Jésus dira à ses disciples : « Je ne boirai plus du produit de la vigne jusqu’au jour où je boirai le vin nouveau dans le Royaume de Dieu » (Mc 14,25). A Cana, Marie a donné l’occasion à son fils Jésus d’entrer dans sa mission en témoignant du don sans mesure du Dieu de l’Alliance et en commençant déjà à manifester cette parole que nous entendons à l’eucharistie : « Heureux les invités aux repas des noces de l’Agneau ».
Au pied de la croix, lorsque l’heure de Jésus sera venue (Jn 13,1), Marie deviendra la mère du disciple que Jésus aimait parce qu’elle sera entrée, par grâce, dans cette compassion qui habite le coeur du Christ. Sur la croix, l’évangile de Jean nous rapporte la dernière parole de Jésus et son dernier acte où « Jésus dit : Tout est achevé, il baissa la tête et remit son esprit » (Jn 19,30). Jésus remet son esprit au Père, il le rend, il le redonne à celui qui l’a fait reposer sur lui depuis le baptême de Jean. Et le Père nous le donne en abondance. Comme à Cana. Le don abondant du vin de Cana préfigure le don immense de l’Esprit de Jésus fait à ses disciples au pied de la croix. L’Esprit saint, l’Esprit dont vit Jésus, nous est donné largement : « À chacun est donné la manifestation l’Esprit en vue du bien » (1 Co 12,7) dit Saint Paul aux Corinthiens. Rendons grâces à Dieu ! Laissons-nous imprégner de cet Esprit Saint pour le laisser vivre en nous et à travers nous.
Abbé Frédéric Fermanel