Deux pères, deux fils, deux paroles venues d’en haut, deux révélations du dessein de Dieu sur deux montagnes, Moriah et Thabor, nous sont donnés à contempler ce dimanche.
Sur la montagne de Moriah, nous entendons ce que signifie être un père. Abraham est face à ses soupçons sur Dieu. Sans lier « ce fils, l’unique (…), Isaac » sur l’autel de ses désirs et de ses espérances, même les plus légitimes... Dieu voudrait-il vraiment la mort de ce fils tant attendu ? Ce soupçon, il n’existe pas seulement vis-à-vis de Dieu mais aussi ici entre nous, entre parents et enfants. Le geste le plus important, c’est Abraham déliant Isaac, le laissant libre et repartant sans lui. Être père, être parents, c’est s’engager dans un chemin spirituel, constamment à reprendre, pour entrer dans un amour de plus en plus vrai et libre. Un amour de plus en plus semblable à l’amour de Dieu pour ses fils.
Sur le mont Thabor, nous entendons ce qu’est être fils. Nous n’avons plus ici un père qui monte avec son fils mais un Fils qui monte librement vers son Père. Un Fils qui n’a jamais eu le moindre soupçon sur l’amour de son Père qui « donne de bonnes choses à ses enfants » (Lc 11,13). En s’entretenant avec Moïse et Elie, les amis du Père, Jésus apprend à être Fils de Dieu, Envoyé du Père, Messie, au moment même où il monte vers Jérusalem pour y rencontrer sa mort. Que peuvent lui dire Moïse et Élie de l’amour de son Père à l’heure de la mort ? Moïse est mort « sur la bouche de Dieu » (Dt 34,5b), lui que « le Seigneur connaissait face à face » (Dt 34,10b) et qui parlait avec lui « comme un ami parle à son ami » (Ex 33,11). Quant à Élie, il est mort emporté par le char du Seigneur (2R 2,11). Tous deux sont partis avant de voir la pleine réalisation des promesses : Moïse n’est pas entré en terre promise et Élie n’a pas vu un peuple converti.
Avant de partir, tous deux ont fait une chose importante : ils ont transmis l’Esprit qu’ils avaient reçu. Moïse à Josué fils de Noun et Elie à Élisée, fils de Shafat. Jésus aussi transmettra l’Esprit. Moïse et Élie avaient été pris en Dieu : Jésus sera rendu à la vie par le Père. Jésus sait davantage ce qu’est être un Fils : c’est donner sa vie pour le bien d’une multitude. Et si être Fils finalement, c’était paradoxalement faire comme le Père ? Tel est le secret de la joie du Père comme du Fils. Telle sera notre joie si nous écoutons et le Fils et le Père. Telle est la parole entendue au mont Moriah comme au Mont Thabor.
Ab. Frédéric Fermanel