« Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ? » Cette question de Jean-Baptiste du fond de sa prison, l’Évangéliste l’adresse aux communautés chrétiennes et à nous-mêmes aujourd’hui. Reconnaissons-nous Jésus comme l’envoyé de Dieu, celui que Dieu avait promis par la voix des prophètes ? Et l’attendons-nous vraiment, pour qu’il prenne place dans notre vie, ou bien nos attentes sont-elles autres, tournées vers d’autres figures ou d’autres réalités terrestres ? Jean-Baptiste lui-même s’est impatienté, ou même a été effleuré ou envahi par le doute. Cette impatience ou insatisfaction devant la non réalisation plénière du Règne de Dieu ou ce que nous estimons être des insuffisances de l’Église … voire nos propres insuffisances, ou ce doute sur l’identité de Jésus, nous ne devons pas hésiter à en reconnaître l’éventuelle présence en nous. Mais, comme Jean, n’en restons pas là. Il est trop facile de rester sur la rive et de contempler la marche du monde en se gardant bien de s’engager, sous couvert d’incertitudes que nous ne prendrions pas la peine de lever. Comme Jean, ne restons pas enfermés dans nos hésitations, sachons interroger, même au fond de nos prisons.
Pour signes de son identité, Jésus évoque les fruits déjà récoltés, alors qu’il en est encore au début de sa mission : les aveugles voient, les boiteux marchent… Cela nous renvoie d’abord à notre propre expérience, et à ce que nous pouvons lire de l’expérience d’autrui. Avons-nous déjà reconnu de tels fruits en nous-mêmes ou chez les autres ? Sommes-nous déjà passés, en divers secteurs de notre vie, des ténèbres à la lumière, de la paralysie à la liberté, de la solitude à la communion, de la surdité à la compréhension, et finalement de ce qui était un enfermement ou une mort à une vie véritable ? Avons-nous fait l’expérience d’un tel renouvellement, d’une telle libération ? Certains ont pris le temps de faire cette relecture et avec eux nous en rendons grâce car les fruits ainsi mis en valeur profitent aussi à toute notre communauté.
Dans l’attente de la venue du Seigneur, il faut faire preuve de patience, comme le dit Saint Jacques dans la seconde lecture. De patience, mais aussi d’impatience, si l’on entend par là, non pas la hâte qui habitait peut-être Jean- Baptiste, mais l’intensité d’une attente et d’un désir pour vivre ce jour qui nous est donné.
Abbé Frédéric Fermanel