Parce qu’elle est un appel de Dieu à la sainteté, c’est-à-dire un appel à vivre de sa propre vie, totalement transfiguré par son amour, chacune de nos vies est une vocation (cf. Paul VI, enc. Populorum progressio). La vocation touche donc notre relation avec Dieu. Une relation qui passe au plus proche de la Croix. Le prophète Jérémie nous montre jusqu’où l’a conduit l’expérience dramatique de la vocation, de l’appel à réaliser le but de sa vie. Il se sait appelé par Dieu à une mission ardue et difficile. Mais arrivé à un certain point, il se sent abandonné par Dieu. Il ressent comme un échec le sacrifice de toute son existence. Sa vie ne lui semble que destruction et il ne voit nulle part la réalisation de la promesse divine de la constitution du Peuple de Dieu. Mais il ne peut se résoudre à se taire car il y a en lui un feu dévorant, au plus profond de son être. C’est le feu de l’appel de Dieu, feu de la grâce que rien d’humain ne saurait maîtriser. La vocation est toujours une initiative divine où Dieu, dans l’appel qu’il adresse, est le premier à s’engager dans une fidélité irrévocable. Peut-être faut-il d’ailleurs le feu de l’épreuve pour comprendre que la vocation est un don de Dieu et non pas le résultat de nos mérites et de nos efforts personnels.
Face aux nombreuses et incompréhensibles souffrances de la vie, la rébellion contre Dieu peut être une tentation. Nous le voyons chez le prophète Jérémie. Mais là où il y a révolte, il n’y a pas de paix. Là où il y a révolte, il n’y plus de confiance en Dieu, dans son projet d’amour sur nous. Nous devons alors bien nous rendre compte que Jésus n’est pas venu apporter une réponse à la souffrance. La seule « réponse » qu’il a donnée est de venir la partager en étant solidaire de ceux qui souffraient. Le Christ souffre avec tout homme qui souffre. Face à la révolte qui peut monter en nous devant telle ou telle épreuve injuste, nous ne nous en sortirons qu’en allant comme Jésus jusqu’au bout de l’amour. Consentir à la croix, c’est consentir à l’amour. Consentir à l’amour c’est consentir à ne plus vivre pour soi mais pour l’autre. Et si cet autre est un ennemi, tant mieux, parce qu’il me permet d’aller jusqu’au bout de l’amour qui consiste non pas à aimer pour être aimé, ni à aimer pour aimer, mais seulement à aimer. Voilà bien la vocation merveilleuse à laquelle tout chrétien est appelé.
Abbé Frédéric Fermanel